Vous vous demanderez sans doute ce que Maarten fait dans une équipe que l'on peut qualifier d'exploration : tout d'abord, l'absence de brume. Et ensuite, la présence d'un bateau. La sensation d'être sur l'eau lui parait naturelle, comme s'il en avait l'habitude. Mais peut-être que c'est son imagination, peut-être que c'est juste le besoin irrepressible de quitter la terre ferme avec l'impression d'agir enfin pour sa fuite de cet endroit insupportable qui lui donne des ailes. Toujours est-il que la présence de ce navire prouve forcément la présence d'êtres vivants en dehors de la Brume et il compte bien trouver comment le ramener à bon port.

Après les cauchemars qui lui ont laissé des blessures bien réelles, il lui était physiquement impossible de rester à quai alors qu'ils pouvaient peut-être enfin trouver des indices. Alors, il rame.
Ces derniers jours ont été chaotiques, c'est le moins qu'on puisse dire.

James : "Yas, ramez mes braves !"

Qu'il dit, le bougre, en s'installant comme une diva pour profiter de la croisière. Eden a aussi fait tanguer légèrement la bicoque en les encourageant joyeusement, et si le grand blond n'aime pas savoir une enfant aussi jeune embarquée avec eux et ne comprend pas bien ce qu'elle fout là, il ne peut pas nier que le bateau est d'excellente facture, à ne pas s'y tromper.
Maarten jette un oeil à Kaïa. Quelque chose dans son aura a changé. Il y a quelque chose de triste dans son regard. Il se rappelle du cauchemar. Elle avait fait de son mieux pour que tout le monde s'en sorte, elle avait mis sa vie en péril pour eux. Tout ça pour quoi ? Avec quelles blessures s'était-elle réveillée, elle ?

Antonio : "C'est ce qu'on fait ! Mais Maarten est tellement doué que j'ai du mal à tenir le cap. Tu as des tendance à aller vite Maarteno !! Attends, regarde on peut faire plus sur ce rythme, tu y vas vite....voilà c'est mieux ! "

Le blond est sorti de ses rêveries par la voix espiègle de l'espagnol. Ah, oui. Il est là, lui aussi. Le coup dans l'épaule qu'il lui met joyeusement lui arrache un grognement ; de douleur, en vérité, mais c'est libre d'interprétation, car il grogne tout le temps. Cette fois, c'est parce que sous son manteau de garde, son épaule est profondément blessée, comme si une créature y avait planté ses griffes acérées. Le pansement le protège des infections, mais la douleur s'estompe trop lentement.

Maarten : "Je ne vais pas m'adapter à ton rythme. Arrête de trouver des excuses pour ne pas te donner à fond. Il me semble que tu as largement assez d'énergie quand ça t'arrange."

En parlant de ramer énergiquement, les autres ont demandé à ce qu'on ne traîne pas. Et pour cause : l'aileron les suit à la trace et son propriétaire reste discrètement caché à leurs yeux par la grisaille de l'eau. Maarten ne sait pas s'il a un jour été capable de faire la différence entre un marsouin, un dauphin et un requin, mais à cet instant précis, il n'est pas très utile sur ce point. Il peut juste ramer, malgré sa douleur lancinante à l'épaule quand ses muscles se tendent.

Kaïa : "En effet, nous ne sommes pas seuls…soyez vigilants."

Maarten : "Ne te préoccupe pas de ce gros poisson. Dans le pire des cas, on lui jette Antonio en pâture."

Il n'est vraiment pas très doué pour faire des blagues donc son ton doit être un peu trop pince sans rire pour être drôle, mais il voudrait que la brune parvienne à se détendre ne serait-ce qu'un petit peu.
Antonio qui demande à ce qu'on ne jette pas son haut par-dessus bord et qui se déshabille car sa peau ne craint pas le soleil, contrairement à celle du blond, ce qui l'irrite prodigieusement.

Maarten : "... Le Mickey dans la brume ?...."

Il secoue la tête et se reconcentre sur le fait de ramer.

Maarten : "Hé, vous deux là devant."

Eden et Arun, leurs prénoms lui échappent.

Maarten : "Vous n'en savez pas plus que nous sur cet énorme bateau, hein ?"

Le blond prend une courte pause, jette un oeil à James qui a l'air inquiet à cause de l'aileron, à Kaïa qui ne semble pas d'humeur à prendre les choses à la légère, et à Antonio qui fait le joyeux luron et qui croit que c'est le moment idéal pour exhiber sa jolie musculature.
Et le blond parle, dans sa barbe, presque pour lui-même.

Maarten : "Dans quoi je me suis embarqué..."

Pourtant, il en est sûr : ils vont trouver quelque chose sur ce bateau. Il y passera la semaine s'il le faut.
Il espère juste que la Brume n'a pas encore l'intention de lui envoyer des ennemis qu'il ne peut pas battre. Si sa propre mort n'est qu'un détail irritant, celle d'Antonio le contrarierait. Beaucoup.
Celle de Kaïa et James aussi, d'ailleurs. Kaïa lui inspire la mer paisible d'un matin d'été. James, la sérénité solitaire de la pêche et la paresse langoureuse du Chat. En tous points, ce sont des gens qui devraient rester éloignés du danger. Et pourtant, James maîtrise la mer mieux que lui, Kaïa est membre du Conseil. Leur équipe est peut-être, après réflexion, plus équilibrée qu'elle ne le laisse paraître.
Sauf Antonio. A quoi sert Antonio ?

Ah.
Evidemment.
C'est le barde. Il en faut toujours un pour remonter le moral des troupes.

[ Maarten rame en faisant de la poésie dans sa tête. Il dit à Kaïa de ne pas s'inquiéter pour le requin et il demande à Eden et Arun ce qu'ils savent sur le bateau]

Ses coups de rame sont rapides et incessants parce qu'il est vraiment terriblement impatient d'arriver à bon port et il n'a pas l'intention de se faire ralentir par la moindre poiscaille qui croit pouvoir faire sa loi. Et puis quoi encore. Mais si ça se trouve, sous l'eau c'est un équivalent de la brume et les poissons sont complètement déglingués ?... Le grand blond préfère ne même pas y penser.

Antonio : Je suis toujours à fond~ Mais ce n'est pas de ma faute si tu es plus dans la force brute et moi dans l'endurance.

Maarten lève les yeux au ciel en le regardant pendant qu'il fait le malin, mais il lui lance quand même un regard entendu en coin. Il voudrait que la balade se termine paisiblement et qu'ils puissent embarquer sur l'immense navire sans entourloupes, mais évidemment rien dans ce monde mystérieux dans lequel ils vivent ne se passe normalement.

Eden est à l'eau et les inquiétudes de Kaïa et James à propos de l'animal qui les suivait semblent se justifier.
Bordel de merde.

Qu'il vienne me voir et je l'assomme d'un seul coup, on n'a pas le temps de jouer à chat avec une saloperie pleine d'écailles qui nous confond avec des phoques.

Il voudrait le dire à haute voir mais tout va très vite : James tente de déconcentrer la créature pendant qu'Antonio, inquiet, lui ordonne de lui venir en aide.

Est-ce qu'il a l'air d'un héros ? Est-ce qu'il a l'air de quelqu'un qui a envie de prendre des risques pour sauver une gamine qu'il ne connaît pas ?
Bordel. De merde.

Evidemment qu'il va réagir immédiatement, par réflexe, sans même avoir besoin de réfléchir. C'est ça d'être un imbécile : le sens de la survie passe après l'impression que tout le monde est son petit frère ou sa petite soeur et qu'il serait prêt à se sacrifier pour que quelqu'un de plus jeune survive à sa place. Mais il faut rester calme, inutile d'imaginer le pire : la petite va refaire surface en nageant joyeusement aux côtés d'un marsouin, voilà tout. Son job de garde lui a tout de même permis d'acquérir un calme olympien au moins en apparence, quand ce qui leur arrive n'est pas complètement surréaliste.

Mais tout est surréaliste. Kaïa a sauté. Deux femmes en moins sur le bateau. Il a des flashbacks désagréables de son rêve. Jouer les héros c'est bien, se jeter à l'eau dans des conditions aussi incertaines c'est presque du suicide. Il faut qu'ils les retrouvent, et vite.

Maarten : Quelqu'un voit Eden ? Kaïa ? Ou le requin ?

Il se tient prêt à les tirer hors de l'eau, son autre main fixée sur sa rame qu'il tient presque comme sa matraque.
Un mouvement sous l'eau. Fluide, élégant, rapide.
Ca pourrait être Kaïa. Mais ça pourrait aussi être la créature. Il efface l'idée de son esprit de mettre un énorme coup de rame sur la surface de l'eau par crainte d'assommer la brune et de la condamner à mort, mais il plonge la rame pour que quiconque passe à côté puisse s'y agripper.  

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