Il devait être plus malin que ses prédecesseurs. Son père l'avait coaché, les sbires de l'empereur l'avait coaché toute sa vie sur la marche à suivre en cas de rebellion, de coup d'état, de sabotage, d'intrusion ou encore comment se débarasser d'un ennemi dérangeant. Antonio avait baigné dans la formation guerrière et impériale toute sa vie. Stratège de guerre avait été le rôle qu'on lui avait assigné depuis sa plus tendre enfance. Fabriquer de l'or et de l'argent, gérer des hommes, avoir la prestance d'un roi, se faire respecter.
Mais tous ceux de qui il avait appris avaient échoué sur cette planète aride qui emportait dans un tombeau de sable ceux qui ne savaient pas s'adapter. Les Fremens étaient un si petit groupe d'individus qui réussissaient à se dresser contre le tout-puissant Empire composé de milliards de pions car c'était leur territoire et qu'ils savaient l'utiliser pour s'en faire un atout. Antonio savait bien que tuer l'homme qui s'était relevé devant lui ne servirait à rien. Il savait aussi qu'il s'était préparé à mourir dés qu'il était parti pour saboter la moissonneuse. Les hommes qui ne craignent pas la mort sont les plus dangereux et il ne ferait que les énerver d'avantage si l'un d'eux venaient à être exécuté. Son père lui aurait fait trancher la tête sur le champ mais son père avait échoué à construire une vraie industrie pour l'Epice, comme tous les autres. S'il suivait leur voie il était déjà mort. Pourquoi ne pas utiliser cet homme là afin de récolter des informations....essayer de lui retourner la tête, se faire accepter parmi les siens...
Antonio possédait un atout. Il se souvenait qu'il était venu une fois sur cette planète lorsqu'il était plus jeune et qu'il exerçait une sorte de fascination sur les locaux qui le prenaient pour leur messie. Il était le seul mâle issu de l'ordre des Bene Gesserit, une caste matriarcale aux pouvoirs surnaturels qui ne se transmettait qu'aux filles. Des oracles avaient prédit la naissance d'un garçon des Bene Gesserit qui naîtrait en l'an 10161, pile l'année où il avait vu le jour. Antonio ne croyait pas aux légendes et aux messies mais il pourrait utiliser ces superstitions pour s'attirer la sympathie des Fremens qui le connaissaient tous.
▬ Tu sais ce que je suis et pourquoi je suis là. Et ce que j'ai fait, je le referais mille fois si cela me permettait de faire fuir les parasites de ton espèce loin d'Arrakis.
Antonio baisse un peu les yeux, vers le cou du blond et esquisse un regard qui semble concerné, accompagné d'un léger soubresaut des épaules.
▬ Sais-tu à qui tu as affaire ? Tu es en présence du Duc et seul héritier de la maison Atréides, puisque tu n'as pas l'air de vouloir collaborer tu vas faire un petit tour dans nos cachots.
Puis il l'attrape par les cheveux et lui donne un coup dans le ventre, l'obligeant à se plier en deux. Mais alors qu'il faisait ça et que son visage se retrouvait non loin de l'oreille du blond, il murmure de façon à ce que les gardes ne l'entende pas.
▬ Nous avons chacun notre destin à mener, le mien est d'être enchaîné à l'exploitation de votre planète. Mais j'ai un marché à te proposer, ce soir.
Puis il se redresse rapidement, regardant d'un oeil dédaigneux cet homme dont il ne savait même pas le nom. Le brun s'adresse à ses gardes et leur ordonne d'une voix impétueuse.
▬ Mettez le dans la prison la plus isolée des autres prisonniers, vous m'apporterez la clef ce soir, je ne veux aucune possibilité pour lui de s'échapper, il saurait vous manipuler et vous convaincre de le libérer avant de vous trancher la gorge !
Peut-être avait-il réussi à attiser la curiosité de cet homme qui allait lui servir d'entrée dans le monde des Fremens.
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Il fait nuit et Antonio marche dans l'enceinte du palais, vêtu d'une cape noire. Les gardes le laissent passer sur son chemin alors qu'il se dirige vers la geôle la plus éloignée de la prison. A la vue de son visage éclairé par les torches modernes les gardes royaux lui ouvrent la porte et Antonio se retrouve devant la porte de fer dans laquelle se trouve Maarten. Il s'avance lentement, les deux hommes sont à peine éclairés et Antonio ne parvient pas à distinguer les traits du Fremen assis dans l'ombre.
Il porte une carafe d'eau ainsi qu'un verre et sans un mot la pose devant les barreaux de façon à ce que le prisonnier puisse se rassasier. L'eau est plus précieuse que l'Epice pour les Fremens et en recevoir est un signe de paix et d'alliance.
Antonio s'assit sur un tabouret devant la prison et inspire doucement.
▬ Quel est ton nom ?
▬ Je suis Antonio Atréides, je me suis présenté tout à l'heure, je m'excuse pour la souffrance que je t'ai causé en te malmenant mais il me fallait ça pour ne pas éveiller les soupçons parmi ma garde et garder le respect de mes hommes.
▬ Je ne souhaite pas te tuer, je voudrais connaître ton peuple et marchander avec vous. Tu n'as pas l'air de te rendre compte de mon pouvoir, mais je peux faire de votre planète un paradis et réaliser tous tes rêves.
Il le regardait intensément.