Deux jours, enfin deux jours, cela faisait plus précisément un jour, six heures et treize minutes que j'avais eu un contact avec les hommes de cet endroit, selon le document que j'avais hérité et certifiant de mon identité.

Je n'avais guère fait preuve de paresse, la moindre seconde dans des pensées inutiles était du temps de perdu pour concocter des théories.

Tous les éléments que j'avais vécus était mise à plat en cette belle mâtinée, on m'avait gentiment offert des vêtements de rechange, histoire de ne pas porter la même tenue et éviter de dormir en tenue d'Eve. La communauté semblait s'être bien formée, ayant une demande d'activité diverse, certainement pour subvenir au mieux les besoins des habitants.

On avait décidé que mon profil était adapté pour livreur, en vérité, c'était celle qui permettait d'éviter le plus de jugement, on m'avait proposé secrétaire ou une activité de bureau, seulement cela voulait dire être en contact régulier avec les mêmes personnes, donc s'exposer à un jugement régulier au vu de ma condition.

Le bilan de santé n'a rien révélé d'étrange sur son mon corps, à moins que certaines informations ne soient filtré, afin d'éviter une panique.

S'ajoutait à cela mon voisin.

Je ne l'avais croisé qu'une seule fois, la soirée de mon premier jour, revenant de mon travail, un peu en sueur, autant dire que pour une impression, je devais lui paraître sportive ou négligée. Ce voisin, nommé Ange, d'après les réceptionnistes, avait engendré une impression, une impression désagréable.

Je le connaissais, en bien ou en mal, ça je ne pouvais guère le définir précisément, mais je le connaissais. Je n'oserais pas dire que ce mystère proche m'obsède, cependant, il accapare une partie de ma réflexion. Plusieurs schémas étaient envisageables. Comme il n'était guère laid, il pouvait très bien être une personne ayant une certaine célébrité, cela restait l'hypothèse la moins problématique pour moi, même si se posait inévitablement la question si j'avais un lien professionnel avec lui.

Je doutais avoir un poste de manager, dans le pire des cas un duo ou le partage d'une même activité.

La configuration la plus problématique aurait été si nous avions une relation privée, savait-il pour mon corps ? Les chances qu'une telle chose se sache étaient très réduite, néanmoins, existante. Dans la situation d''être en couple était-il une personne aimante ou violente ?

Peut-être qu'il était un agresseur de mon passé ou alors que j'étais la personne qui voulait la nuire.

J'avais passé toute la matinée à réfléchir, avant que mon corps me rappel qu'il avait besoin de se nourrir, venant à me faire un petit repas et continuer d'agiter mes neurones. Pourquoi ne pas profiter de cette opportunité pour se rapprocher, mieux se connaître, avoir un voisin comme allié restait une situation rassurante.

Je me permis donc de demander aux réceptionnistes si mon voisin avec des horaires, prétextant vouloir simplement faire connaissance et niant en bloc toute allusion que je souhaiterais le draguer. Il ne fallait pas que je complique inutilement ma situation et découvre le secret de cet endroit.

Avec les informations en main, je vins à pendre une douche et me préparer, afin d'être plus que présentable, enfilant ma tenue d'arrivée et cachant le rubis sous mon vêtement, la chaîne laissant deviner que je portais un collier. Cet accessoire était, lui aussi, un autre mystère « 's Blessing », la longueur de la phrase rendait le contenu confus, pouvant être aussi bien un souhait, une prière, qu'une maxime. De qui était cette « bénédiction », si on touchait au mysticisme, cela donnait un nombre de possibilités vertigineux, si on n'incluait que les divinités bénéfiques, ne pouvant occulter le fait que je pouvais aussi bien avoir une faveur d'une entité jugée malfaisante, tout était possible avec cette amnésie anormale.

Je me permis d'attacher mes cheveux en deux couettes, ayant emprunté des ciseaux pour couper deux rubans de mon haut en laine, cela ne valait certainement pas deux vrais rubans, mais dans la situation actuelle, cela suffirait. Je n'avais pas spécialement eut de difficulté à les nouer, mais cela ne permettait pas de dire quelque chose sur mon passé, tout le monde peu faire un noeud papillon.

Une fois prêt, je quittais ma chambre pour me présenter à la porte de mon voisin. Normalement, il devrait être présent, avançant doucement mon index, sentant mon cœur battre d'excitation mais aussi de crainte, espérant qu'il n'allait pas mal considérer mon initiative.

Le contact avec l'appareil se fit, venant à enclencher la sonnerie dans la pièce, attendant patiemment une réaction, j'avais les mains devant moi, mon poignet droit étant tenue par ma main gauche. J'essayais de ne pas respirer trop rapidement, pour ne pas montrer une certaine nervosité.

Je pousse un soupir pour chasser une partie de ce stress.

- Calme-toi, tout va bien se passer. Qui sait, il est certainement charmant et courtois, ainsi qu'ouvert d'esprit.

Cela faisait quelques jours à peine que tu étais arrivé. Quelques jours depuis que tu avais dérivé, depuis que tu t’étais retrouvé dans ce lieu inconnu, sans aucun souvenir de ta vie d’avant. Quelques jours depuis que cet horrible sentiment de manque te prenait les entrailles chaque matin, dès que tu ouvrais les yeux, jusqu’au moment où tu les refermais - si jamais tu arrivais à t’endormir, bien entendu. Tu avais appris que la nuit t’angoissait, sans que tu saches vraiment pourquoi. Ainsi étaient les choses, peut-être le découvriras-tu un jour, ou peut-être pas. Il y avait des choses qu’il ne fallait peut-être mieux pas savoir.

C’était étrange, de reprendre la vie avec aussi peu de ressources sur soi-même. Tu n’avais aucune idée de qui tu étais, pour quoi tu étais fait. Tu n’avais aucune réponse sur pourquoi tu voyais tes côtes ressortir quand tu te regardais dans le miroir, ni pourquoi tu avais autant de bleus ou de cicatrices, encore moins pourquoi tu t’étais réveillé avec une compresse sur l’œil. Certes, ça s’était arrangé depuis, mais tu ne pouvais t’empêcher de te poser des questions. Il y avait trop de mystères, trop de questions sans réponses - ça t’angoissait. Ça t’angoissait aussi d’être entouré d’inconnus, de ne connaître personne. De n’avoir aucune attache, personne à qui t’accrocher. D’être seul dans cette mer noire et sombre.

Il y avait, cependant, une personne qui faisait exception à la règle : Pucel, qui était arrivé seulement quelques jours après toi, et dormais dans la chambre voisine à la tienne. Vos regards s’étaient croisés, et bien que tu avais l’impression ne jamais l’avoir croisé (comme toute autre personne ici), son visage t’était familier.  Et rien que ça, ça te rassurait un peu. Ça voulait probablement dire que tu connaissais au moins une personne ici, et même si tu ne savais pas exactement qui, ça te suffisait. Après, peut-être que la familiarité était à sens unique, peut-être te faisais-tu juste des idées, à vouloir être sauvé.
Mais non - tu avais cette intuition. Tu connaissais Pucel, tu en étais sûr. Tu le sentais au fond de toi. Comment, tu ne le savais pas, pas encore. Tu comptais le découvrir, peut-être, éventuellement. Ou au moins discuter, peut-être que vous en tireriez quelque chose.

Tu n’avais cependant pas eu le temps, pas directement. Il faut dire que quand tu l’avais croisé, tu étais parti travailler, et tu n’allais pas t’arrêter comme ça sur ton chemin. Mais maintenant, ça te restait dans la tête. Tu avais besoin, besoin d’en savoir plus, même si tu doutais que Pucel t’apportes des réponses. Peut-être avais-tu juste besoin de parler, parler avec quelqu’un qui…
Juste quelqu’un de familier.

Tu étais dans ta chambre lorsque c’est arrivé. En train de regarder par la fenêtre, tripotant machinalement le médiator dans ta poche. Ça t’arrivait, parfois, de juste observer tes alentour. Tu avais toujours un peu de mal à réaliser que tu ne rêvais pas, que tout ce qui t’arrivais était bien réel. Tu étais perdu, oui. Mais quelqu’un viendrait te sauver. Tu le savais.
C’est sur cette pensée que ta sonnette avait retenti. Curieux, tu t’étais retourné vers le bruit. Tu n’attendais personne, personne en particulier. Pendant un court instant, tu te laissas croire au Prince Charmant - mais c’était probablement trop tôt.

Te dirigeant vers la porte, tu l’avais ouverte - pour te retrouver nez-à-nez avec Pucel. Ouvrant de grands yeux, tu les clignas ensuite - l’observant de haut en bas, pour retrouver peut-être un indice, quelque chose qui te reviendrait à l’esprit.
Un sourire se dessinant sur tes lèvres, tu ouvres la porte un petit peu plus.

« Oh… Pucel, c’est ça ? Qu’est-ce qui… »

Ton regard se perd sur son visage, son visage si familier, et pourtant si étranger. Tu sais que ça ne se fait pas de fixer, mais tu veux savoir.

«… Qu’est-ce qui t’amènes ? »

Tu clignes des yeux, avant de soudainement céder le passager sur le côté, l’invitant à entrer.

« Oh, pardon, excuse-moi. Rentre, je t’en prie. Fais comme chez toi ! »

Tu souris une nouvelle fois, ajoutant.

« Tu… »

Puis, secouant la tête, tu te reprends.

« On… se connaît, n’est-ce pas ? Ton visage m’est familier, mais ce n’est peut-être que moi. Tout est étrange ici, on finit par se perdre… »

Tu relèves la tête, lui offrant toujours ton sourire le plus chaleureux.

« Enfin, excuse-moi ! Tu voulais quelque chose ? »

Après un peu de temps, la porte daignait s'ouvrir, venant à laisser apercevoir Ange … il y avait décidément quelques choses chez lui qui faisait écho.  Il faisait les grands yeux, venant à m'inspecter de haut en bas. Je n'avais pas une tenue féminine qui était trop vulgaire. Cela me perturbait, ayant la sensation qu'il analysait le moindre tissu, les moindres formes sur moi, c'était assez … malaisant.  

Je fus cependant tout aussi surpris que lui en me voyant, qu'il sache mon prénom, je n'avais pas souvenir de m'être présenté. Mais, après il avait pu aussi demander aux réceptionnistes, ce n'était pas une information jugée sensible dans ce bâtiment, apparemment, tant que l'on avait le numéro de la chambre et que l'on se montrait clair sur la motivation de sa demande.  

Je répondis au fait que c'était bien Pucel mon prénom par un bref hochement de tête. Heureusement, c'était en anglais et non en français, je pense que s'il y avait des personnes, entendre un « Pucelle » aurait choqué, tout en engendrant de fausses idées à mon encontre.

Il demandait la raison de ma présence et semblait fasciner par mon visage, me demandant si j'avais quelque chose sur mon minois. Je n'avais pas spécialement mit de maquillage, d'une part car je ne savais pas où m'en procurer et d'autre part, n'ayant pas encore de quoi me permettre ce genre de coquetterie.  Il se reprit et m'invitait à entrer, ce que je fis timidement.

Ange fut assez direct par la suite, venant à annoncer que mon visage était familier...  je ne pus m'empêcher à ce moment de penser, venant à irrémédiablement entortiller des cheveux sur mon index, tournant toujours et encore.

Il me regardait avec un visage radieux, revenant au sujet principal, venant à difficilement lâcher ses cheveux et stopper ce maudit tic.

- Je ne vais pas tourner autour du pot. J'ai aussi une sensation de familiarité. C'est étrange le fait que tu l'ai aussi. Cela pourrait me faire supposer que cette amnésie incomplète ne peut affecter les liens  avec certaine personnes. La question reste, est-ce que cela touche uniquement les liens bénéfiques ou incorpore celles négatives.

Je me tenais le menton, la tête un peu basse, zyeutant le sol et cherchant des indices. La probabilité que des personnes connus se croisent me semblait assez improbable, il y avait-il de la sélection pour les personnes victime d'amnésie ?  Mieux vallait échanger avec lui, pour trouver des potentiels points communs.

- J'avais des questions concernant cette sensation d'être proche. Aurais-tu des souvenir d'avoir voyagé souvent ? Puis …

Je plongeai ma main sous mon col, pour saisir le rubis et le sortir, faisant rapidement, ayant un corps ressemblant à une femme, il aurait pu se faire des idées. L'objet sorti, je le présentais, gardant la chaîne autour de mon cou, c'était un objet précieux, je ne pouvais me permettre de le perdre ou le tendre à des inconnues.

- Cet objet ou ce bout d'inscription te dis quelque chose ?  

J’espérais qu'il puisse un peu éclairer ma lanterne, même si je n'étais pas desespéré au point de boire n'importe quelle parole, d'autant que s'il avait la tête aussi vide que la mienne, il y avait de forte probabilité que la réponse soit décevante.

C’était rassurant de savoir que tu n’étais pas le seul à avoir cette impression de déjà-vu. Au moins, tu ne devenais pas fou. Il semblait y avoir véritablement quelque chose qui vous unissait. Quoi, tu ne pouvais pas encore savoir, mais tu y viendrais éventuellement… Parce que maintenant que tu savais que vous étiez familiers, tu allais vouloir connaître la nature de ce lien, et essayer de reconstituer vos passés communs.

Tu avais fermé la porte derrière Pucel, et tu l’avais ensuite regardé pour l’écouter. Sa question était intéressante - tu avais beau penser que tu ne ferais pas de mal à qui que ce soit, tu ne pouvais pas être sûr de n’avoir blessé personne dans le passé. Après tout, tu n’avais aucun souvenir. Et si tu avais blessé des gens ? Et si tu étais un criminel ? Tu ne pouvais pas rayer la possibilité d’avoir fait souffrir les autres.
Regardant tes mains un instant, tu fermas les poings avant de les fourrer dans tes poches à la recherche du médiator pour te changer les idées. Rien que le fait d’y penser te rendait malade.

Tu relevas la tête vers Pucel, qui te posas des questions. Si tu avais voyagé ? Tu aimerais bien pouvoir l’aider, lui donner une réponse utile - mais toi-même, tu ne savais pas. Avant même que tu ne puisses répondre, cependant, il sortit un rubis attaché à une chaîne pour te le présenter, et te demandas si cela te disait quelque chose. Tu plissas alors les yeux, observant l’objet et le reste d’inscription comme pour te forcer à te souvenir. Mais rien ne te vînt à l’esprit.
Tu poussas alors un soupir, et secouas la tête.

« Je suis désolé, ça ne me dit rien. En tout cas, je n’ai rien qui ne me vient à l’esprit, pour l’instant. Mais si dans le futur, ça me rappelle quelque chose... Je te tiendrais au courant. »

Un sourire maladroit se dessina sur ton visage, alors que tu étais gêné de ton incompétence à lui apporter de l’aide.

« Je n’ai aucun souvenir d’avoir voyagé non plus… Enfin, j’ai très peu de souvenirs, tout court. Je suis arrivé il y a seulement quelques jours, alors tout est encore très flou… »

Tu ris nerveusement. La vérité, c’est que ça t’angoissais, de ne rien savoir. Pourtant, tu n’étais pas une exception - tout le monde ici était pareil. Mais ça t’angoissais, d’avoir perdu tout ça. de ne plus savoir qui tu étais, réellement.
Étais-tu une vraiment bonne personne ?

D’un geste de la main, tu tiras ta chaise de bureau et invitas Pucel à s’y asseoir, alors que tu t’en allais remplir deux verres d’eau.

« J’imagine que tu n’as pas plus d’informations que moi sur tout ça non plus, n’est-ce pas ? »

Tu souris à nouveau, et lui servit un verre sur le bureau, avant de t’asseoir sur ton lit. Hésitant un instant, tu finis par sortir ton médiator de ta poche, et le tendis en sa direction.

« Et… j’imagines que ça ne te dis rien non plus, n’est-ce pas ? »

Ton regard se posa sur le petit objet au creux de ta paume. C’était un peu ridicule. Pourquoi ça lui dirait quelque chose ? C’était juste un bête accessoire de musique, usé et effacé.
Et pourtant, tu avais l’impression d’y attacher une si grande valeur, comme si tout ton être en dépendait.

Tu relevas alors la tête vers Pucel une nouvelle fois, souriant à nouveau.

« Je ne sais pas pourquoi, j’ai l’impression que cet objet est important pour moi... Mais j’imagine que si je ne sais rien du tien, tu ne dois rien savoir du mien non plus. Après tout, c’est un médiator comme les autres… »

Reposant ton regard sur l’objet, tu soupires.

« … Comment on fait, maintenant ? Tu veux essayer d’en savoir plus sur nos passés, c’est ça ? »

Je voyais bien qu'il essayait de forcer sa mémoire, je ne dis rien, mieux valait qu'il tente le coup, peut-être que lui aura plus de facilité à déterrer ses souvenirs. Après un petit instant de blanc, la réponse vint à tomber. Cela me laissait songeur sur l'utilité d'avoir gardé cet objet, venant à l'entendre dire que s'il avait des souvenirs sur le rubis il me le dirait, rendant son sourire maladroit par le miens qui se voulait tendre, enfin tendre, c'était un sourire normal pour moi, peut-être que le corps ne perdait pas autant les souvenirs que la mémoire … non je devais me faire des idées.

Il fit part du brouillard qu'était sa mémoire, n'ayant pas de souvenir de voyage. Hum … peut-être que j'étais une personnes qui me baladait ou que l'on baladait beaucoup, j'avoue que la seconde hypothèse ne me réjouissais guère, ayant la sensation d'être une valise que l'on trimbalait. Cela me laissait supposer que c'est au gré des voyages que je l'aurais croisé.  

C'est alors qu'Ange se permis de m'inviter à m'asseoir sur sa chaise, venant à doucement glisser sur le côté et m'asseoir, croisant ma cuisse droite sur celle de gauche, venant à enrouler mon index droit autour d'une mèche. Les éléments qui concordaient commençaient à s'engranger. Le maître des lieux supposait bien, venant à répondre avec douceur.

- En effet, hormis quelques éléments personnels et beaucoup de questions, je n'ai guère plus d'indice.  

Je lui sourie à nouveau quand il tendit le verre, le prenant délicatement du bout des doigts et prenant une petite gorgée, avant de le poser sur le bureau. Il me présentait un médiator, le saisissant avec d'infinie précaution, comme s'il était fait de sable, l'observant sous toutes les coutures, essayant de fermer les yeux pour ressentir quelque chose … rien. Je le reposais dans sa main, venant à hocher négativement de la tête.

Rien, pas un souvenir ou ne serait-ce qu'un ressentit. Cependant, cela laisse supposer beaucoup de chose.

Je retirais mon index de ce tortillon de cheveux, pour prendre cette fois le verre à deux mains, l'un le soutenant par le bas, prenant une nouvelle gorgée. J'écoutais ce qu'il disait, mettant petit à petit les pièces du puzzle, me doutant que ce n'était pas quelques pièces qui m'éclairciraient sur le mystère.  Il conclut par deux questions, venant à être bien droite au bureau et simplement pencher ma tête vers Ange.

- Cette amnésie n'est pas normale, nous avons des souvenirs vagues qui semblent ciblé et puis nous avons chacun un objet qui nous est cher. On peut supposer que tu as été fan de musique ou que cela devait être ton métier avec ton médiator. Comme tu ne sembles pas savoir si tu as beaucoup voyagé, partons du principe que tu es resté dans ton pays. De là, on peut supposer qu'à un moment, nous nous sommes croisé, plus moi qui serais arrivé dans ton pays.  Réfléchissons …

Je laissais ma tête partir en arrière, fermant les yeux pour réfléchir, venant à continuer de parler dans cette posture.

- Ce bijou semble être un cadeau, mais cela peut être aussi un porte-bonheur, le « blessing » et  « 's » laissant supposer une bénédiction quelque peu divine. Peut-être une divinité liée au corps et à la beauté, donc si je pars sur cela, j’aurais été dans la mode ou acteur … enfin actrice du coup … l'idée que j'ai tout de suite serait une vidéo avec toi qui fais la musique et moi qui accompagne. Je doute qu'une relation autre que professionnelle soit possible, sauf si ….

Je redressais ma tête en ayant les joues rouges devant une pensée quelques peu obscènes.

- Non, non. Vue que je suis une personne qui me balade beaucoup, je ne vois pas grande chose à part du professionnel ou limite du copinage à distance.

Je pris deux gorgées pour chasser cette idée idiote, il ne fallait pas sauter à la conclusion que nous étions plus que des amis.

- Pour le moment on ne peut faire que des suppositions, tant que l'on ne possède pas davantage de souvenir. Mon hypothèse peut être totalement fausse après tout.

Comme tu pouvais t’en douter, le médiator ne réveillait aucun souvenir chez Pucel. Tu soupiras, un peu déçu, mais tu t’y attendais un peu. Vu l’importance que tu semblais donner à l’objet, la personne qui le reconnaîtrait devait probablement être très proche de toi. Enfin, peut-être, peut-être pas. Après tout, tu avais toi-même oublié ce qu’il représentait réellement. Tu savais juste qu’il t’était important, et avec le peu de souvenirs que tu avais, c’était déjà pas mal.

Tu remis le médiator dans ta poche, le serrant fort dans le creux de ta paume, un peu comme pour te rassurer, un peu comme une promesse. Un jour, tu sauras - un jour, tu te souviendras. De pourquoi cet objet t’était si cher, de si quelqu’un te l’avait offert, ou s’il représentait un tournant dans ta vie. Un jour, tu découvriras tout, tu te le jures. Et en attendant, tu allais tout faire pour raviver tes souvenirs.

L’esprit rempli de nouveaux doutes et de questions, tu ne pouvais t’empêcher d’amener ta main libre à tes lèvres pour te ronger les ongles, tandis que Pucel reprit la parole. Tu hochas la tête à ses premiers mots - en effet, cette amnésie ne semblait pas normale. Tu te demandais comment ça marchait, pour oublier autant de choses sur soi, et pourtant en savoir autant sur le monde. C’était quelque chose que tu aimerais savoir aussi, et qui te faisait réfléchir. Et puis, normalement, lors d’une amnésie, les souvenirs sont censés revenir petit à petit, n’est-ce pas ? Là, tu ne pouvais même pas raconter un souvenir d’enfance ou dire comment était ta famille. Tu ne pouvais même pas savoir si tu avais un être cher ou non.
Tu étais seul, en un sens.

Tu continues d’acquiescer aux mots de Pucel. Il te semblait naturel d’apprécier la musique, avec ton médiateur et ta boutique toute fraîche dans la ville. Tu avais même découvert que tu savais jouer d’un ou deux instruments. Mais de là à savoir si c’était réellement ton métier ou non, il y avait tout un monde. Tu ne te voyais pas être sur scène… Enfin, peut-être aurais-tu pu, avant. Avec tes expériences de vie, tu aurais grandi. Mais aujourd’hui, en ayant tout oublié ? Tu ne te voyais pas jouer devant une foule.

Écoutant les suppositions de Pucel, tu penchas la tête sur le côté lorsqu’il énonça la possibilité d’une relation professionnelle, ou autre - mais il n’alla pas plus loin dans son raisonnement, et revînt sur l’idée d’une relation de travail.
Tu hochas cependant la tête après ses derniers mots - il était vrai qu’avec le peu d’informations, les suppositions étaient tout ce que vous aviez.

« Ton hypothèse peut tout à fait être vraie aussi… Il ne faut pas partir d’un point négatif. »

Tu souris, relevant la tête pour le regarder, et posas ta main sur ton lit pour essayer d’arrêter ton tic.

« Il est vrai que je pense particulièrement aimer la musique… Cela m’apporte un certain sentiment que je ne saurais décrire. Je sais jouer, aussi. De la guitare, visiblement, et du violon. Mais je ne sais pas si je jouerais pour mon métier… Enfin, je ne sais pas si je suis assez bon, ou si j’ai le profil d’en faire mon métier, je ne sais pas si tu vois ? »

Tu fis une pause, réfléchissant. Pouvais-tu réellement être une star ? Quelqu’un de connu ? Un chanteur, ou musicien dans un groupe ? Tu ne savais pas.

« Peut-être que mes expériences passées m’ont amené à travailler dans la musique, après… Et qu’on s’est ensuite connus comme ça. Mais dans l’immédiat, sans mes souvenirs, je ne me vois pas sur scène… Plus travailler dans une petite boutique comme maintenant. »

Tu soupiras.

« Enfin, après, à part ça, je ne sais pas comment on aurait pu se connaître… À part, je ne sais pas, si on s’est connu dans une même école ou autre… Peut-être s'est-on tout simplement croisé comme ça. »

Tu jouais nerveusement avec le médiator dans ta poche tout en réfléchissant.

« Je n’ai aucune idée de si j’ai vraiment voyagé, mais j’ai la connaissance de parler au moins deux langues… Donc il est possible que j’aie au moins déménagé une fois à un moment donné ? Sauf si j’avais des parents de deux nationalités différentes… Ce qui est possible aussi. »

Tu souris une nouvelle fois.

« Bref… Toutes les hypothèses sont bonnes à prendre, en soi. Je ne sais pas si on arrivera à aller très loin avec tout ça, après. »