“Je t’ai dit que je m’en occupais, la discussion est close !”

Le ton de la voix de Kaïa, d’habitude jamais aussi haut, s’éleva dans les bureaux de la Mairie. Dernier échange de regards, la colère d’un côté, la détermination de l’autre, la jeune femme tourna finalement le dos à son interlocuteur d’un bond, achevant ainsi l’échange presque houleux qui venait de se dérouler.

D’un mouvement un peu sec, elle ouvrit la porte du bureau de Silas et s’extirpa de la pièce avant de la claquer derrière elle. Elle prit un instant pour souffler, se calmer. Elle n’était pas spécialement en colère, plutôt agacée, et en total conflit d’intérêts avec l’autre membre du Conseil. Le débat était de savoir quelle sanction appliquer à Mika pour le vol qu’elle avait commis ainsi que la personne qui devait s’en charger.

Les deux adultes ayant toujours eu une vision différente du Conseil et de la vie sur l’île, il n’était pas étonnant de les voir souvent en désaccord. Silas, dans son désir de perfection et de discipline, aimerait que la sanction soit ferme et donnée par ses soins, afin de marquer le coup. Kaïa, elle, dans son inquiétude pour le bien-être de chacun, trouvait la réaction de son collègue quelque peu disproportionnée. D’accord, Mika avait volé des vivres dans les fermes avoisinantes et elle devait être punie pour ça, sinon ce serait laisser la porte ouverte à tout, mais ce n’était qu’une gamine bon sang !

Après quelques inspirations lentes et profondes, Kaïa prit la direction de son propre bureau où l’attendait Mika. Elle s’annonça à la jeune fille de trois petits coups à la porte avant de l’ouvrir et d’entrer dans la pièce. Elle fut un peu surprise, quoique pas tant que ça, de la voir assise à même le sol. Les sièges disséminés çà et là devaient pourtant être plus confortables que la surface plane du parquet. Ils étaient aussi peut-être plus intimidants, donnant une ambiance tout de suite plus formelle à l’endroit, plus froide. D’un léger sourire attendri au coin des lèvres, l’Hawaïenne s’avança d’un pas tranquille et vint rejoindre en tailleur la demoiselle, à même le tapis.

“Bonjour Mika.”

Voix douce, posée, qui se voulait rassurante. La jeune femme fut obligée de se pencher un peu sur le côté afin d’espérer croiser le regard de l’adolescente, qui semblait se cacher derrière son bob.

“Je suppose que je n’ai pas besoin de te dire le pourquoi de ta présence ici ? Dis-moi, pourquoi avoir fait ça ?”

Kaïa avait déjà une idée de comment tout cela allait se terminer. Elle voulait cependant comprendre ce qui avait poussé Mika à l’acte, afin de chercher des solutions si elles pouvaient être trouvées, ce dont la membre du Conseil ne doutait point.