Sydney s'était toujours douté que boire trop alors qu'il travaillait le lendemain allait revenir le hanter. Juste, pas comme ça.

Il n'avait pas pris le temps d'enlever complètement son costume avant de s'écraser dans son lit, sans savoir qu'il allait se réveiller au milieu de nulle part dans l'herbe froide et humide en pleine nuit... avoir su, il se serait au moins mis une robe de chambre. Le blond se releva en grognant, retenant un soupir de misère en sentant le rouge à lèvre qu’il avait encore s’étaler sur sa joue, puis poussa enfin un glapissement de terreur quand il réalisa l’absurdité de la situation... mais surtout quand Antonio lui sauta dans les bras. Tiens donc, il n’était pas seul. Encore un peu sous le choc, Syd prit la peine de lui donner quelques petites tapes d’encouragement dans le dos avant de le repousser doucement.

-Pas trop fort chéri, je veux pas te vomir dessus.

Même de son costume, il ne restait pas grand-chose : apparemment son boa de 10 pieds en peluche et son haut de bikini vert ne l’avaient pas suivi dans son escapade nocturne, seulement ses daisy dukes et ses souliers plateformes. Il s’empressa d’enlever ces derniers pour s’éviter une mauvaise chute, puis écouta attentivement Oksana qui s’était dépêché de donner des directives au petit groupe pour éviter la panique totale. Le couturier l’écoutait d’une oreille distraite, mais autre chose retenait son attention: le quatrième membre de la troupe lui disait quelque chose, mais pas comme les autres qu’il avait déjà croisé ici et là avant et pendant la fête, mais celui-là invoquait un souvenir bien plus lointain, mais encore inconnu...

Pas maintenant. Le plus important était de se sortir de là, ensuite ils essaieraient de comprendre.

En fronçant les sourcils, Sydney ramassa la page et tenta à son tour de la déchiffrer, en vain. Il la passa une dernière fois aux intéressés qui voulaient tenter leur chance, puis la rangea dans la poche de son short pour la garder en sécurité. Le cri d’appel d’Antonio fit sursauter le blond, qui se retint de justesse de l’engueuler pour lui avoir fait peur, mais il lui fit aussi réaliser à quel point ils étaient vulnérables, ainsi seuls dans le noir. Ou pas si seuls... À tout moment, quelque chose pourrait leur répondre dans les ténèbres.

-OK, OK... est-ce qu’on peut bouger maintenant? Je sais pas qui était là avant nous, mais il doit pas être bien loin.

 

Il aurait pu se laisser porter par le courant, bien protéger par les éclaireurs du groupe et s’en tenir au strict minimum pour assurer sa propre survie, mais Sydney avait bien vite réalisé que ça n’allait pas se passer comme ça. Son sang ne fit qu’un tour quand Oksana leur ordonna soudainement de partir sans elle, sa voix soudainement plus grave et haineuse. C’était quoi son problème?! Antonio devança le blond dans ses interrogations, mais vu la réaction de l’éclaireuse il finit plutôt par se confondre en excuses et Sydney ne put retenir un soupir agacé. Que les deux artistes en sachent moins sur la survie dans la Brume et aient besoin des deux autres pour s’en sortir, d’accord, mais au point de ne pas pouvoir dire un seul mot sans se faire rabrouer? Pauvre Antonio, si innocent…

Mais quelque chose n’allait pas avec la fille du groupe. Elle avait bel et bien ordonné qu’ils restent ensemble, alors pourquoi…? Après plusieurs phrases d’encouragement mentales, le couturier tapota doucement l’épaule d’Antonio.

-Et si tu partais devant avec… notre ami éclaireur? Je vais rester avec Oksana, comme ça on reste en petits groupes. Si vous trouvez quelque chose, vous n’avez qu’à crier et on viendra vous chercher.

S’il y avait vraiment quelque chose derrière eux qui menaçait de les rattraper, la meilleure chose à faire était d’éloigner le chanteur le plus possible pour le garder en sécurité et, si possible, sans trop l’inquiéter. Sydney n’était pas complètement sans défense, et il n’avait pas peur de se battre bec et ongles s’il le fallait. Mais contre quoi, il l’ignorait toujours. Au moins, sa frustration devant la situation lui permettait d’ignorer sa peur. Les bras croisés, le blond toisait l’éclaireuse d’un regard très peu amusé.

-Fille, c’est quoi ton problème, hein? Tu veux qu’on t’abandonne à ton sort ou quoi? Pour cette fois, je veux bien rester et faire sûr que tu crèves pas, mais si ça commence à devenir une habitude, ne compte pas sur moi pour sauver tes fesses! J’ai pas envie de rester ici plus longtemps que nécessaire!

Malheureusement pour le blond, il était désormais trop pris dans sa provocation pour se souvenir qu’il n’était pas non plus à l’épreuve du danger, et surtout pour se rendre compte qu’il venait de commettre une terrible erreur…

 

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'Jet d'attaque' : 1

Tout se passa très vite. Alors que Zhen forçait les deux artistes à continuer d’avancer, au grand déplaisir de Sydney qui n’aimait pas se faire dire quoi faire, Oksana se jeta sur eux avec une branche pointue, mais se blessa grièvement à la jambe et s’écroula par terre. Tout de suite, Antonio vola à son secours et le blond resta planté là à tenter de comprendre ce qui s’était passé. Ce qu’il avait été stupide… clairement, elle avait vu quelque chose dans la forêt et était restée derrière pour l’inciter à sortir de sa cachette et s’en débarrasser, mais la présence du reste du groupe avait fait échouer son plan. Antonio avait bien raison, qui étaient-ils pour juger de ses capacités d’éclaireuse? En secouant la tête, le couturier voulut le rejoindre pour l’aider, mais avec cette brume épaisse, tout paraissait de plus en plus loin… et bientôt il fut impossible de voir où se trouvaient les autres.

-Zhen? Antonio?

Des rires et des voix se rapprochaient, et bientôt la terre humide se changea en dalles de béton rose sous ses pieds. Est-ce qu’ils étaient de retour en ville? Non, ce n’était pas ça, en fait ça ressemblait plus à… un parc d’attraction? Et pas n’importe lequel, à Disneyland?

-... J’en ai marre. J’en ai tellement marre… huh?

Une silhouette noire venait de s’extirper de la brume, juste devant lui. Ce n’était pas un des compagnons car aucun d’entre eux n’auraient su se promener avec autant de grâce ou l’assassiner du regard avec une telle perfection. Celle qu’il avait devant lui était une reine. Une Méchante Reine. Sydney ne put s’empêcher de pousser un petit rire nerveux.

-Heeeeeey Queen. Toujours aussi canon, hein? Dites, vous avez pas vu mes amis dans le coin?

Faire comme si tout était normal, et après il pourrait partir. Elle avait beau être cruelle et chiante, la Reine avait quand même la classe, donc s’il lui montrait assez de respect elle devrait le laisser tranquille, non? Et puis, elle était intimidante, mais pas effrayant… enfin, tant qu’elle n’était pas…
Sa gorge se serra quand elle sortit un chalice rempli d’un liquide fumant de ses longues robes. Quand elle se mit à boire, la brume se colora de vert et elle fut prise de convulsions, gémissant de douleur alors que ses cheveux viraient au gris.

-Non. Non. Non Queen non!

Il ne se souvenait de rien sur son passé, mais il savait que ça, il ne voulait pas le voir. Il sentait son cœur battre de plus en plus fort et sa bouche s’assécher, les larmes lui venaient aux yeux et la force de fuir lui manquait alors que deux mains se tendaient vers lui, d’abord petites et délicates, changeant pour devenir plus larges, tordues et couvertes de verrues.

-NOOOOOOOOOOOOOOOOON!!!

L’adrénaline reprit enfin le dessus et il réussit à tourner les talons et fuir, le bout de ses orteils s’éraflant contre le béton, son dos couvert de sueur. Peu importe, il ne pouvait pas rester là, il ne pouvait pas regarder ça. Derrière lui, un ricanement maléfique se fit entendre, d’une voix complètement inconnue, mais il n’allait pas prendre le temps de se retourner. Tout ce qui lui importait était de fuir, fuir le plus loin possible, aussi vite qu’il le pouvait.

Dans sa détresse, le blond ne remarqua pas ce qui se trouvait devant lui et percuta Zhen de plein fouet. Le choc le fit retomber vers l’arrière et il s’écrasa par terre, mais en voyant enfin un visage familier, Sydney ne put se retenir de pleurer.

-Elle… elle arrive…! C’était horrible, elle a… je l’ai vu… les autres, où sont les autres?!

Certainement, Zhen n’était pas  le cerveau le plus rapide du groupe. Était-il vraiment en train de subir tout cela ? Le temps de procéder à une quelconque analyse, son environnement se mouvait déjà autour de lui. Le tintamarre enfantin, les décors lumineux embaument l’espace. Des architectures encore inconnues à ses yeux, des individus qui se remuent dans sa vision périphérique.
Il en a vu assez. Bien trop pour y pouvoir poser des mots. Alors quand ils viennent manquer il ne reste que sa hargne pour apposer des maux.
Si la brume eut l’habitude de lui en faire entendre et voir diverses facéties. Cela ne ressemblait à rien d’auparavant aperçu. Impossible de s’y faire à cette idée. Non pas qu’il soit trop pragmatique et logique pour réfuter ce moment. Bien trop d’égo et de colère lui rappellent que tout ceci se joue de lui.
Les muscles se contractent au fur et à mesure que Zhen avançait sur le sol coloré, ignorant les bruits qui parasitent ses oreilles. En finir avec cela, c’était déjà l’objectif, peu importait le reste. Le Taïwanais détestait fondamentalement ce qu’il voyait. Les poings fracassent à porter tout ce que la brume formait, elle avait eu même l’audace de le faire arrêter devant quelques nains au nombre de sept. Autant de secondes qu’il fallut pour s’en débarrasser de coups de pied rageurs, laissant quelques crissements hallucinatoires le faire vaciller.
Son souffle s’amenuisait comme les minutes, la brume s’infiltrait dans ses pensées, il tournait en rond, devant cette seule vérité que tout ceci existe, redessinant sans cesse les lieux qu’il voulait fuir.

Un contact soudain lui redonna le sens de la réalité. Il vint se cogner contre Sidney; lui tomba à la renverse, se noyant dans des sanglots et propos déformés par la peur. Zhen ne put s’empêcher de tendre la main pour essayer de le relever.

-Je suis avec toi, ne t’en fais pas. 

Il n’avait pas vraiment les mots justes pour réconforter, mais il pouvait lui affirmer son soutien. Comprenant la panique qui peut s’installer à cause de cette maudite brume.

[color:e1ea=0818A8]-Je ne sais pas où sont les autres, nous nous sommes tous éparpillés. On reste ensemble si on veut les trouver… Dans le pire des cas, on se tire à deux. 

Toujours une solution de secours, Zhen fit face à la débandade du groupe et la conséquence.
Marchant à petits pas dans les allées, il n’avait pas de second plan pour se faire remarquer.

-EH OH, ON EST ICI !! 

Ses poumons hurlaient à vive voix, ne sachant pas vraiment ce qu’il pourrait attirer avec cela.

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'Jet d'attaque' : 5

S’accrochant à Zhen comme si sa vie en dépendait, Sydney n’eut même pas la force de hurler quand il se retrouva enseveli par les poupées, ni même de se débattre quand le sol disparut sous ses pieds pour être remplacé par l’eau glacé. Si tout cela avait été un cauchemar, il se serait réveillé à cet exact moment, son corps incapable d’en prendre plus… mais c’était réel et la seule échappatoire restant était cet état de choc ou son cerveau n’enregistrait plus rien, quitte à le mettre en encore plus grand danger. Qu’est-ce qu’il aurait pu faire de plus, de toute façon? Il était si faible, si vulnérable, il n’avait nulle part où aller, autant bien se laisser couler et abandonner…

Mais l’eau n’était pas suffisamment profonde pour le laisser disparaître complètement, et quand le couturier heurta enfin le fond du bassin, son corps reprit enfin le dessus sur son esprit et il n’eut qu’à se redresser pour sortir la tête de l’eau, toussant et grelottant. Un bateau approchait, ou plutôt tentait d’approcher, et à bord se trouvait Antonio, qui tentait de combattre le Mickey géant. Il avait l’air de bien s’en sortir, mais ça n’allait pas continuer s’ils restaient là. S’il pouvait juste le distraire assez longtemps, peut-être que les deux artistes auraient la chance de fuir.
Non sans grande difficulté, Sydney attrapa à son tour une des poupées chantantes et la lança vers le monstre mécanique, mais contrairement au chanteur il rata complètement son coup et la poupée retomba dans l’eau juste derrière Mickey. Tout n’était pas perdu, par contre : le bruit fut suffisant pour distraire le géant, et Sydney en profita pour rejoindre le bateau et le tirer vers lui, dans l’espoir de le guider vers la sortie. Plus facile à dire qu’à faire, avec toute cette brume… Brume? Depuis quand? Et est-ce qu’il entendait une cascade?

La chute ne fut pas longue, mais elle fut brutale. L’américain s’attendait à de l’eau, mais il s’écrasa plutôt contre un sol de béton en compagnie d’Antonio et le bateau renversé. Une vive lumière bleue avait remplacé l’obscurité de la forêt et ses yeux prirent quelques secondes à s’adapter, mais Sydney eut un violent sursaut en se retrouvant face à des dizaines et des dizaines de reflets. Devant eux se trouvaient un véritable labyrinthe de miroirs… et derrière eux aussi. Aucune trace de Zhen et Oksana. Mais là où il aurait dû voir son visage dans les nombreux miroirs, il vit autre chose.

-Non. Non.

Une fourmi grosse comme son bras, d’un orange éclatant. Sans être particulièrement connaisseur, Sydney savait qu’en général, plus une bestiole était colorée, plus elle était dangereuse, et il déglutit en essayant de ne pas trop penser au véritable nombre de fourmis qu’il pouvait y avoir dans ce labyrinthe. Alors qu’il tentait de négocier ce passage dans le labyrinthe, tentant de se convaincre qu’il y avait un autre moyen, il entendit un grand vacarme juste au dessus de leur tête.

-BOUGE!!!

Sans attendre, le couturier attrapa Antonio par le collet et le tira vers le labyrinthe. Le Mickey géant tomba du ciel, apportant avec lui sa joyeuse musique et ses poupées, et se remit à les pourchasser. Maintenant, ils n’avaient plus le choix, s’ils voulaient s’échapper ils devaient continuer.

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'Jet d'attaque' : 3